I need a hero

Les soirées passées à la maison ont été nombreuses ces derniers mois, ce qui nous a permis de consacrer davantage de temps à la lecture. J’en ai profité pour me plonger dans la mythologie grecque avec «Mythos» et «Heroes» de Stephen Fry, qui revient notamment sur le mythe de Jason.

Le jeune homme et ses compagnons, les Argonautes, embarquent sur le navire Argo pour partir à la conquête de la Toison d’or dans un royaume lointain. Ils parviennent à s’en emparer après maintes péripéties, mais le voyage du retour est également hérissé d’obstacles. En chemin, les Argonautes doivent ainsi prendre une décision cruciale: faut-il tenter de franchir le détroit que gardent les deux monstres marins Charybde et Scylla, l’un sous la forme d’un gouffre tourbillonnant et l’autre d’une la terrifiante créature, ou le contourner par la voie des Planctes et ses redoutables «roches errantes» qui s’ouvrent et se referment sur une mer en furie?

Notre héros Jason choisit la seconde option. Bien qu’étant un excellent navire, l’Argo devient rapidement le jouet des vagues et menace de se fracasser sur les roches errantes malgré les efforts acharnés du capitaine. Dans le vent et la tourmente, Jason entend alors s’élever une voix: c’est la  figure de proue de l’Argo qui lui parle, car elle possède le don d’oracle. Elle ordonne alors au capitaine de lâcher le gouvernail. Tout l’équipage abandonne le combat contre la mer déchaînée et se jette sur le pont en priant… et, ô miracle, l’Argo franchit sans dommages la passe aux rochers mortels.   

Être humble – et agir

Comme beaucoup de mythes grecs, cette histoire fait écho à notre époque contemporaine: avec la pandémie qui nous tient sous sa coupe depuis bientôt deux ans, il n’y a que de mauvaises options – et même si l’on se décide pour celle qui serait la moins dangereuse, rien ne garantit que nous puissions garder le contrôle de la situation. 

On peut douter que la capitulation, la soumission totale à des puissances supérieures représentent la solution miracle dans le monde d’aujourd’hui, mais une certaine humilité face aux forces du destin a selon moi toute sa place dans les enseignements à tirer de la crise.

Même si, lorsqu’il est question de réformer la prévoyance vieillesse ou d’investir les fonds des caisses de pensions, se jeter sur le pont du navire en espérant le salut n’est pas une option. Agir est ici le mot d’ordre – avec, pourquoi pas, l’aide précieuse d’une héroïne déterminée ou d’un héros astucieux. Les intervenants programmés pour la manifestation vous présentent chacun une héroïne ou un héros pour vous accompagner tout au long de cette nouvelle année – et je profite de cette occasion pour vous adresser tous mes vœux de réussite et de santé dans la conquête de votre Toison d’or personnelle. 

Jean-Marc Wanner, Expert LPP agréé, Aon Suisse

« Lucky Luke défend la population et lutte pour la justice sociale, il protégerait assurément la Réforme de la prévoyance de tout éventuel ennemi. De plus, il veillerait aussi sur la fortune des caisses de pensions contre les aléas des marchés financiers. Il a maitrisé tous les desperados et même les Dalton. La protection de la réforme de la LPP et la surveillance des places boursières seraient donc aisées pour lui. »

Réforme de la prévoyance vieillesse

Michael Bolt, Directeur général, HOTELA

« Nous aurions besoin de la visionnaire Clara Zetkin, fondatrice de la revue «die Gleichheit» et organisatrice de la première journée internationale des femmes. Elle trouverait certainement les bons arguments contre un discours qui défend des privilèges sur le dos des générations futures ou s’accroche à l’inégalité hommes/femmes de l’âge de la retraite. Mais peut-être que c’est le cuisinier de la soupe de Kappel qui aurait le plus de chances de faire passer la réforme, après avoir contribué à la paix entre catholiques et protestants en 1529. » 

Mathilde Mottet, Vice-secrétaire centrale JS Suisse

« Rosa Luxembourg est la figure qui serait la plus à même d’apporter les changements nécessaires au système de prévoyance professionnelle. Elle ne soutiendrait pas une réforme antisociale mais instaurerait un système de retraite populaire solidaire, juste et égalitaire, un système qui servirait enfin les intérêts des femmes en reconnaissant le travail du care, un système financé collectivement et pour les 99% car il réduirait les inégalités socioéconomiques plutôt que de les aggraver. Toutes et tous les retraitées et retraités pourraient ainsi vivre la vie digne et libre qu’elles et ils méritent. »

Michèle Mottu Stella, Experte LPP agréée, partner Prevanto

« S’il faut choisir un héros mythique pour sortir de l’ornière dans laquelle semble s’enfoncer la réforme prévoyance vieillesse (AVS & LPP), je pense qu’Hercule serait mon choix. Il lui serait confié le défi de mettre en œuvre douze mesures extraordinairement efficaces en faveur des femmes pour atteindre enfin l’égalité des opportunités, des salaires et dans les faits.  C’est grâce à cet héroïsme-là que le sacrifice (financier et symbolique) demandé aux femmes dans le projet actuel trouverait un apaisement. Les travaux d’Hercule invitent à se transformer pour devenir meilleur. »

Année financière 2022

Vincent Juvyns, Global Market Strategist, J.P. Morgan Asset Management

« En 2022, c’est d’Hercule dont nous aurons besoin pour nous assurer une bonne année économique et financière. En effet,  les défis à relever sont nombreux, à l’instar de la lutte contre la pandémie de COVID-19, la lutte contre le changement climatique, la lutte contre l’inflation, la stabilisation de l’endettement des états, la normalisation de la politique monétaire des principales banques centrales, solutionner la crise énergétique, apaiser le contexte géopolitique fébrile… Cependant, comme dans la mythologie grecque, nous sommes convaincus que nous pourrons relever ces défis et que malgré une volatilité qui sera plus élevée, l’économie mondiale et les marchés financiers devraient connaitre une année positive en 2022! »

Damian Künzi, Senior Economist, Swiss Life Asset Managers

« Hansel et Gretel ont vécu dans leur conte de fées une expérience qui profite également aux investisseurs d’aujourd’hui. Les malheureux enfants ont été abandonnés par leurs parents dans la forêt ‹…lorsque une grande inflation est entrée dans le pays…›. Après l’aventure, ils retournèrent chez leur père avec de nombreuses perles et des pierres précieuses. En période d’inflation, les valeurs réelles restent toujours de premier choix. Aujourd’hui, en 2022, Hansel et Gretel investiraient leur fortune dans des actions, dans l’infrastructure ou l’immobilier. Ceci pour qu’à la fin de l’histoire, on puisse dire: ‹C’est là que tous les soucis ont cessé, et ils vivaient ensemble dans la joie.› »

Eric Rosset, Head of Multi Asset Switzerland, Pictet Asset Management

« Voici déjà quelques années que Poséidon régnait en maître absolu des marchés financiers. Crise financière, pandémie rien ne semblait remettre en question sa légitimité. Il a fallu que l’inflation, un de ses pires ennemis, couplée d’une croissance nominale spectaculaire pour que Poséidon soit forcé de réduire le niveau de sa liquidité. Ce changement de régime aura des conséquences sur les marchés en 2022: potentielle baisse du couple prix/bénéfice, plus de volatilité sur la croissance des bénéfices et pression à la hausse des taux d’intérêts. Les actifs réels devront être privilégiés au actifs nominaux et les actifs illiquides aux actifs liquides, avec une mention pour l’immobilier étranger. »